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Peintures
2024

On remonte?

Gaza

Acrylique sur toile

160 × 185cm

Clara Nebinger propose l’évocation d’un paysage de guerre, d’un champ de ruines. (...) Il s’agit de « préserver les vestiges d’une guerre pour garder la mémoire de toutes les guerres » dit-elle. On pense aux grandes photographies de Sophie Ristelhueber, sur Beyrouth, le Liban, montrant l’état du monde contemporain, les cicatrices de la guerre sur les territoires. La peinture est ici, associée à un texte poétique, écrit dans le même rouge que les balafres du paysage. Les mots parcourent la salle d’exposition, comme recréant un horizon lui-même absent de la peinture, comme pour exprimer le temps de la lecture, pour élargir le paysage à tous les champs de bataille, le titre le confirme.

Le texte dit:

« Le village de Vauquois n’existe plus depuis longtemps, il ne demeure que des cratères qui portent la forme des dernières explosions. Il y a eu la guerre, ici. De cette ruine contemporaine les trous sont froids, il ne reste que la mémoire. Mais plus loin, plus au sud, des trous brûlent encore.»

Ainsi, la colline de Vauquois fut le théâtre de terribles affrontements lors de la Première Guerre mondiale et le village du haut de la colline fut totalement détruit ainsi que les deux tiers de ses habitants. Une ville basse sera reconstruite, elle compte vingt et un habitants... Le texte éclaire la peinture sans l’expliquer réellement, il est comme un équivalent poétique ouvrant une réflexion sur la folie destructrice des hommes, et aussi sur les différences et interactions qui existent entre écriture et peinture.

À la lecture, les images des guerres actuelles nous reviennent. Le paysage lui-même apparaît différent après la lecture du texte. « Il y a une affinité fondamentale entre l’œuvre d’art et l’acte de résistance » disait Gilles Deleuze, c’est aussi le propos de Sophie Ristelhueber quand elle effectue, en 1982, la série Beyrouth pendant la Guerre civile du Liban (1975-1990). La série se compose de trente-et-une photographies en noir et blanc, sans présence humaine, ce sont des images de décombres qui ne dégagent que très peu de nostalgie ou de charge émotionnelle, relevant davantage du reportage que de l’autofiction : une esthétique du constat factuel, ce sont les titres qui nous informent, comme ici, mais le traitement pictural de Clara marque une subjectivité plus poétique.


Isabelle Poussier

Neiges éternelles

Acrylique sur toile

120 × 185cm

Collection privée

Le format étonne, comme si le paysage était contraint dans une focalisation brutale où la roche, très proche, offre ses strates, et où la vallée en contrebas pousse au vertige, le regard glisse dans le vide vu depuis un télésiège. La montagne est une des passions de Clara, mais nous faisons face à un portrait de paysage presque géologique, et à l’évocation de la catastrophe programmée où le glacier a commencé à fondre lentement plus bas, pour preuves, la couleur de ses ombres bleues et les coulures discrètes. Une petite ombre au loin évoque le câble soutenu par les pylônes du télésiège qui souligne furtivement l’artificialisation responsable du chaos prochain. « Un paysage bientôt ruiné par les changements climatiques » dit l’artiste. C’est peut-être l’idée de notre inconscience du désastre pourtant annoncé, lorsque le paysage se fait séduisant.

Un espoir possible, au coin en bas à gauche de la toile, une petite étendue vert printemps, signe de la résilience de la nature, mais un vert un peu artificiel, presque radioactif et il s’échappe de la toile pour revenir dans le réel, il ne s’agit que de peinture...

« Il arrive un moment où la peinture semble se détacher de l’image et mener à elle seule le combat »

Anne Malherbe

 

Les neiges éternelles ne le sont plus vraiment, les glaciers fondent inexorablement: « Depuis les années 1850, les glaciers des Alpes ont perdu 50% de leur volume, et sur la même période, c’est 90% du volume des glaciers des Pyrénées qui a disparu » affirme le glaciologue Pierre René.

Loin de nier l’esthétique encore bien réelle de nos paysages, le signal d’alarme doit être activé et le titre poétique cache mal la fragilité du paysage et la ruine à venir. Parlant de l’art écologique Paul Ardenne affirme : « Ce n’est pas seulement un art qui s’intéresse à l’environnement, c’est un art de combat pour prendre des décisions.»

Isabelle Poussier

Issue de secours

Installation, acrylique sur impression, gravats, goudron

30 × 50 × 20cm

Réalisée lors de la résidence à l'atelier Etant donné

Dans les œilletons de la porte d’ÉTANT DONNÉ, sur fond de paysage urbain imprimé et repeint, une borne incendie est au centre d’un rouge vif, percutant.

Ce dispositif de lutte contre l’incendie mis en place par les communes en prévention des incendies, évoque à la fois le feu et l’eau, questions écologiques brûlantes depuis quelques années déjà. Des gravas sont disposés au premier plan. L’ambiguïté est là : s’agit-il de chantier ou de ruine, de construction ou de destruction, les mégafeux qui ravagent partout une très grande surface boisée, et l’eau qui vient à manquer pour les éteindre, sont le signe de notre impuissance face au désastre. Avec cet ensemble exposé dans une boite de petite dimension, et qu’on regarde par les œilletons comme de très loin, on pense 16 encore aux peintures de Duncan Wylie et à ses scènes violentes (immeubles éventrés, ruines, chaos) et à la fois attirantes. Pour Anne Malherbe « c’est le traitement pictural qui, à lui seul, assume les entrechocs et architecture le chaos, avec des couleurs presque fluorescentes, rouges, orangées, roses, des coups de pinceau à l’intensité électrique, des effets de flou qui tiennent en suspension la brutalité de l’effondrement ». L’installation est aussi visible derrière la porte, devenant ainsi une sorte de maquette des toutes les ruines possibles. 

Genre pictural en soi, essentiellement au XVIIIe siècle, la mise en scène des ruines inspire Diderot : « Les idées que les ruines réveillent en moi sont grandes. Tout s’anéantit, tout périt, tout passe. Il n’y a que le monde qui reste. Il n’y a que le temps qui dure. Qu’il est vieux ce monde ! Je marche entre deux éternités. De part que je jette les yeux, les objets qui m’entourent m’annoncent une fin et me résignent à celle qui m’attend. [...] Je vois le marbre des tombeaux tomber en poussière ; et je ne veux pas mourir. »

La ruine de Clara renverrait donc à une vanité contemporaine, sans crâne ni sablier, à l’image de celle de Jean-Luc Moulène, Produits (Nature morte de trottoir), en 1996, pour laquelle il récupère dans la rue les éléments de l’installation (cailloux, coulures de ciment, bloc de ciment...), afin de rendre manifeste ce qui ne peut se laisser saisir: le temps et la mort.

Isabelle Poussier

Au bout de la ville

Acrylique sur toile

70 × 100cm

Loca n°1 

Sérigraphie bichromie

29,7 x 42cm

Loca n°2

Sérigraphie monochrome

29,7 x 42cm

Janvier

Acrylique et pastels grasses sur toile

30 × 40cm

Janvier 2021.jpg

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© Clara Nebinger

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